Le phénomène de la mendicité prend de plus en plus d’ampleur à Bamako, au Mali. Chaque jour, des mendiants se faufilent entre les véhicules pour quémander de quoi manger ou toute autre forme d’aide. Dans un pays où l’insécurité est omniprésente, la mendicité devient une menace pour le public.
La mendicité des enfants, en particulier dans la ville de Bamako, prend des tournures préoccupantes. Ces enfants, appelés talibés, cherchent de la nourriture ou de l’argent et sont visibles partout. Âgés de moins de 14 ans, la plupart d’entre eux vivent dans des conditions déplorables.
Le petit Seydou OUEDRAGO nous raconte sa journée : « C’est ma famille qui m’a envoyé chez un maître coranique à Djebani pour apprendre le Coran et partager mes connaissances avec les autres. Pendant la semaine, nous avons deux jours d’apprentissage et les autres jours, nous partons en ville pour mendier. Parfois, je peux obtenir 1500f ou 2000f ; je donne 1000f et je garde les 500f. »
Lévi Daou, âgé de 11 ans et originaire de Ségou, vit chez son maître coranique au quartier Mali. « C’est mon père qui m’a inscrit à l’école coranique avant de partir en voyage. J’y suis pour apprendre et espérer une vie meilleure dans l’au-delà. Nous étudions le Coran pendant trois jours : mardi, jeudi et dimanche ; le reste du temps, nous cherchons de quoi manger. Je peux ramener 3500f, 2500f ou 2000f. Mais quand je gagne 3000f, je donne 2500f et garde le reste. »
Si ces jeunes vêtus de habits déchirés et sales suscitent la compassion chez certains, d’autres les perçoivent comme des délinquants. « Ils sont dans les rues à mendier, mais certains ne le font pas. Un jour, ils ont volé le téléphone de ma voisine devant nous et nous avons dû le retrouver jusqu’à Kalaban pour le récupérer. Il est vraiment temps que leurs maîtres trouvent une solution », déclare Kandia KEITA, habitant à Djicoroni Para.
Dans les rues, leur présence est mal vue selon Assan DOUMBIA : « Ils ne sont pas des talibés ; la plupart sont des voleurs. Quand ils s’approchent de toi, il faut faire attention sinon ils te volent. »
Derrière cette activité qui permet à ces enfants de satisfaire leurs besoins primaires, l’Islam ne cautionne pas l’exploitation des enfants. Moussa CAMARA, imam et prêcheur à la mosquée de Djicoroni Para, nous confie : « La mendicité est une pauvreté qui pousse une personne à quémander. Cependant, envoyer des enfants mendier va à l’encontre des valeurs islamiques. On doit quémander seulement lorsque toutes les autres options ont échoué ; si quelqu’un obtient ce qu’il cherche, il doit impérativement abandonner cette pratique. En faire un travail ou inciter les enfants à mendier est une mauvaise chose. La place des enfants n’est pas dans la rue mais à l’école, dans des établissements confessionnels pour apprendre et contribuer à la société. Nous devons tous avoir la crainte de Dieu. En tant que maître coranique, ne prends pas sous prétexte d’éduquer les enfants d’autrui pour les faire mendier. Et aux parents : ne confiez pas vos enfants à n’importe qui pour apprendre le Coran ; renseignez-vous sur la personne et sa situation avant tout. Espérons que le public prêtera attention à nos propos. »
Ce phénomène prend de l’ampleur dans les grandes villes du pays même si la pauvreté en est la principale cause. Les autorités ainsi que les parents doivent accorder une attention particulière à cette problématique devenue un véritable danger et un problème pour la société.
Kadidiatou TRAORÉ